vendredi 3 janvier 2014

Château Lassègue: un bijou à Saint-Émilion

Château Lassègue, un bijou à Saint-Émilion 
ou Dix ans d’une fabuleuse alliance franco-américaine



C’est une très belle histoire: celle d’une alliance entre un vigneron français originaire de Gascogne et un ancien avocat américain de Californie. 


Nous sommes en 2003. Jess Jackson, sa femme Barbara Banke ainsi que Pierre et Monique Seillan découvrent le Château de Lassègue, une magnifique chartreuse située à deux kilomètres du célèbre village de Saint-Émilion. Ils tombent tous les quatre immédiatement amoureux de cette propriété et des vingt hectares de vignes qui l’entourent. Elle est depuis plus de deux cent cinquante ans entre les mains de la même famille, qui souhaite vendre : les deux couples achètent le domaine et dix hectares de vignes adjacentes supplémentaires viendront agrandir cette acquisition.
Jess Jackson et sa femme Barbara, avocats de profession, avaient déjà, en à peine vingt ans, bâti une entreprise viticole au succès foudroyant en Californie puis en Italie, au Chili et en Australie. Véritable visionnaire, Jess a toujours cru au terroir plutôt qu’aux marques. Dans le même temps, Pierre Seillan, brillant vigneron-œnologue qui travaillait dans le Bordelais, était tout à fait partant pour de nouvelles aventures en Californie et en Italie. L’association des deux familles commence donc sept ans plus tôt, lorsque Pierre Seillan rencontre Jess Jackson. Ce dernier lui propose de le rejoindre en Californie pour développer et créer de nouveaux vignobles sur les terres qu’ils possèdent sur les collines de la Sonoma Valley, à partir de cépages bordelais. Cela donnera les vins Vérité, en trois cuvées : La Muse, La Joie et Le Désir. Depuis ce moment, l’entente parfaite des deux hommes, leurs vision et philosophie communes sur l’élaboration des vins donneront naissance à de grands vins, aussi bien dans le comté de la Sonoma qu’en Toscane où Jess Jackson possède un vignoble. Le décès de Jess en avril 2011 ne fera que renforcer l’amitié et l’association des deux familles qui n’ont qu’un seul et même but : faire de Château Lassègue un des meilleurs vins de Saint-Émilion. Barbara Banke et ses trois enfants Katie, Julia et Christopher reprennent le flambeau que leur mari et père leur a transmis, en compagnie de Pierre et Monique Seillan et de leurs deux enfants, Nicolas et Hélène. Château Lassègue est avant tout un projet familial commun, fruit de l’alliance de deux générations.



De vieilles vignes au soleil
Précision géographique non négligeable, la région incluant le village et les vignobles fait partie du patrimoine culturel mondial de l’Unesco. Le village de Saint-Émilion, qui jouxte Lassègue, se situe sur la rive droite de la Dordogne, près de Libourne. Les vignes y sont particulièrement bien protégées du nord et exceptionnellement bien exposées sud-sud-est. Cet ensoleillement de l’ensemble des vignes de l’aube au coucher du soleil favorise une maturité homogène des raisins. Mais Lassègue possède d’autres atouts, en parfaite adéquation avec la philosophie des micro-crus si chère à Pierre Seillan. En effet, l’étude des sols à permis de relever plus d’une dizaine de sols différents et, de fait, de pouvoir répartir les différents cépages selon les types de sols « afin de les observer et de les vinifier séparément et offrir ainsi des produits fins et de grande qualité » précise Pierre Seillan. L’encépagement est constitué de 60 % de merlot, 35 % de cabernet franc et 5 % de cabernet sauvignon. L’âge moyen des vignes du domaine – quarante à soixante ans – en fait de vieilles vignes qui captent mieux les messages de la terre grâce à leurs racines profondes. Pierre Seillan ajoute : « Ces vieux ceps de vigne, qui ne produisent que quelques grappes de raisin, offrent généreusement tous les sucs de la terre et expriment à leur apogée l’expression des cépages de Saint-Émilion ».
Le perfectionnisme dont fait preuve Pierre Seillan ne s’arrête pas là : l’élevage en barriques est un travail d’orfèvre, tant et si bien qu’il sélectionne lui-même les meilleurs bois français de la méranderie (fabrique de tonneaux) de Jess Jackson pour l’élevage des vins de Lassègue, et contrôle les phases de séchage et de chauffe adaptées à chacun des différents lots. Dans le chai, les barriques ne portent pas de noms de tonneliers mais des noms de forêts ! Luxe ultime, Seillan a eu le choix entre quinze forêts différentes et dix protocoles de chauffe exclusifs. La philosophie innovante des micro-crus que Pierre Seillan a affinés en Californie a également influencé ses techniques délicates d’assemblage à Lassègue. Et il est le seul vigneron qui utilise cette pratique à Bordeaux. Cela lui permet d’isoler chaque zone et parcelle du vignoble en fonction du type de sol et de cépage, optimisant ainsi la richesse et la complexité du vin.
Vous l’aurez compris, Pierre est un homme de la terre et tout doit être fait pour respecter ce qu’elle doit donner. Il faut faire confiance à la nature et, jusqu’à présent, il ne s’est pas trompé : les vins de Château Lassègue sont appréciés dans le monde entier grâce à l’incroyable énergie déployée par son épouse Monique, qui se partage entre la Sonoma Valley et Saint-Émilion, comme un oiseau. Cette superbe affaire de famille est assurée de perdurer grâce à l’implication des enfants, bien déterminés à prendre soin de ce joyau. Dix ans et déjà tant de transformations et de résultats accomplis ! Souhaitons une très longue vie à cette histoire franco-américaine.





Une longue histoire à Saint-Émilion
 Louis XVI disait de Saint-Émilion que c’était le « Nectar des dieux » mais l’histoire de ce grand vin est bien antérieure au XVIIIe siècle. Elle remonte au IIe siècle, lorsque le général romain Marcus Licinius Crassus, lieutenant de César, apporta de Rome des vignes à cultiver. Par la suite, au IVe siècle, le poète et homme d’État Decimius Magnus Ausonius (qui donnera plus tard son nom au célèbre Grand Cru Château Ausone), propriétaire de 40 hectares de vignes, rédigea les premiers commentaires sur le vin de la région.
Au VIIIe siècle, un moine bénédictin nommé Émilian arrive au lieu dit plateau de Pavie, où il se fait connaitre par sa grande bonté et les miracles accomplis sur la population de la région. Devenu ermite, il vécut dans des grottes de calcaire sous l’église monolithique construite en son honneur. Après sa canonisation, l’église et le village prennent son nom : Saint-Émilion.
La « Jurade », confrérie des vins de Saint-Émilion, fut créée à la fin du XIIe siècle afin de gouverner la région et de superviser la qualité de production des vins. Un vin de qualité recevait Le Grand Sceau de la Jurade, tandis que les vins ne remplissant pas les critères choisis étaient détruits. Aujourd’hui encore, la Jurade garde un rôle de confrérie autour du vin, avec pour mission de protéger l’agriculture et la production viticole de la région. L’AOC Saint-Émilion a été établi en 1930 et le premier classement des châteaux date de 1955 (cent ans après le classement des médocs de 1855). Le classement a lieu à nouveau tous les dix ans, le plus récent date de 2012.
La production viticole au Château Lassègue date, elle, au moins du XVIIe siècle lorsque la famille Belliquet reçut une concession de terrain du roi Louis XIV. « La Sègue », qui signifie aussi petite forêt, était un clin d’œil à la colline boisée à l’extrémité de la propriété des Belliquet, située le long d’une arête.
En 1738, la propriété est acquise par Jean Taillande, qui construit le château et donne son nom au domaine. Les bâtiments viticoles et la résidence avec sa façade à doubles tours ont été construits dans le style chartreuse du XVIIe siècle.

Patricia Courcoux Lepic




mardi 31 décembre 2013

Wine in Style vous souhaite une pétillante année 2014!!


Laurent Perrier et les jardins ou déambuler dans un jardin une coupe de champagne à la main...

Plusieurs Maisons de Champagne rivalisent de créativité sur leurs coffrets et bouteilles pour mettre en avant le caractère de leur marque, mais Laurent-Perrier est la seule à avoir tissé depuis plus de quinze ans un lien particulier avec l’art des jardins.


La Maison de Champagne Laurent-Perrier est propriétaire du Château de Louvois dont les jardins ont été dessinés par Le Nôtre comme vous le découvrirez plus loin, c’est pour elle une évidence de cultiver cet art des jardins éphémères ou éternels. En particulier au moment de fêter le 400e anniversaire de la naissance du grand Jardinier du roi Louis XIV !
Depuis quinze ans, Laurent-Perrier est le fournisseur officiel du célèbre Chelsea Flower show, fête des jardins qui se tient tous les ans en mai à Londres et qui demeure depuis cent ans un évènement majeur en Angleterre. Inauguré chaque année par la famille royale dont on connaît la passion pour les jardins, ce spectacle horticole unique au monde attire plus de 150 000 visiteurs en six jours. Et tandis que chacun arpente nonchalamment les allées en admirant ces installations éphémères, les plus grands paysagistes du monde s’affrontent pour remporter le prestigieux prix du plus beau jardin de ce show, en ayant respecté les contraintes et thèmes imposés. C’est dans cet esprit que Laurent-Perrier est entré naturellement dans la compétition depuis 1999. Il remporte depuis, avec une régularité exemplaire, les médailles d’or et Best of the year, prestigieuses distinctions obtenues grâce aux créations extraordinaires des paysagistes qui collaborent le temps d’une édition.
Sir Terence Conran fut le premier à s’associer à Laurent-Perrier. Depuis, les plus célèbres architectes-jardiniers se succèdent pour créer au fil des ans des compositions zen, artistiques, historiques, méditatives ou voyageuses. Au fil des voyages au milieu des plus belles fleurs, des plantes les plus rares, Laurent-Perrier se crée petit à petit une place importante dans cet univers délicat des jardins.


L’art de vivre à la française
Ce pas franchi, la célèbre maison à la Cuvée Grand Siècle, en plus de sa participation dans de grandes manifestations autour des jardins, décide de créer ses propres évènements afin de mettre en valeur son art de vivre et certaines de ses prestigieuses cuvées. Les Jardins Ephémères de Laurent-Perrier poussent dans des lieux insolites, dans le monde entier. En 2010, c’est à New York dans le célèbre restaurant La Grenouille que la Maison invente une magnifique création végétale. La même année, le créateur floral belge Daniel Host crée un paysage contemporain sur la terrasse du restaurant Beige d’Alain Ducasse, dans le quartier chic de Ginza à Tokyo. Les bouteilles des meilleures cuvées se promènent dans ces mises en scènes inédites, pour le plus grand plaisir des épicuriens amoureux des fines bulles. À Milan, le paysagiste italien Paolo Pejrone tapisse de centaines de pots de fraisiers le cadre du musée Bagatti Valsecchi dédié aux arts décoratifs de la Renaissance pour célébrer, via la fraise, la Cuvée Rosé.
En 2013, la manifestation Jardins, Jardin, aux Tuileries à Paris, a fêté ses dix ans. Dans cet écrin dessiné par Le Nôtre, Laurent-Perrier a mis à l’honneur l’art de vivre à la française, motto de la Maison pour la création des cuvées de champagnes, laissant au paysagiste designer Luciano Giubbilei le soin de dérouler un long chemin de roses pâles encadré de buis taillés.



Le Grand Siècle des jardins
Retour à quelques encablures de Tours-sur-Marne, fief de Laurent-Perrier. Nous sommes dans le parc du Château de Louvois, un petit château qui accueille les hôtes de marques de la Maison. Louvois fut acquis par Bernard de Nonancourt, alors président de Laurent-Perrier, pour célébrer la Cuvée Grand Siècle, symbolisant parfaitement pour lui le Grand Siècle de Louis XIV. Le domaine appartenait à l’époque au marquis de Louvois, ministre de Louis XIV. À la fois ministre de la guerre et surintendant des Bâtiments de France, Louvois est chargé de surveiller les travaux du château de Versailles. Il meurt en 1691 à l’âge de cinquante ans, non sans avoir transformé magnifiquement son domaine en un château classique et élégant remplaçant le château-fort entouré de douves. Château qui domine un parc de cinquante hectares parsemé de bassins et fontaines, un jardin typique de l’époque avec des perspectives, des alignements de tilleuls et d’ormes. Louvois fait aussi planter cent pieds de muscat et des figuiers, fruit préféré du roi. L’été, des orangers et autres plantes tropicales sortent alignées dans des caisses en bois.

Devenus parc romantique au XIXe siècle, les jardins retrouvent une allure classique « à la française » au XXe. La famille de Nonancourt décide alors d’en savoir plus sur l’histoire de ce jardin. La légende prétend en effet que le premier jardin est l’œuvre du jardinier du roi, André Le Nôtre. Une étude commandée aux étudiants de l’Ecole Nationale Supérieure d’architecture de Versailles (dirigée par Pierre Bonnaure et Georges Farhat, deux des plus grands spécialistes des jardins de Le Nôtre) confirme que Le Nôtre est bien l’auteur du dessin original du jardin ! Lequel dessin est précieusement conservé au Musée national de Stockholm. On a, avec certitude, la preuve que Louvois s’était entouré des jardiniers avec lesquels il travaillait au château de Versailles : un certain Jules Hardouin-Mansart et un certain André Le Nôtre, donc, qui imaginèrent les plans du parc et  les perspectives. Pour Ernest de Ganay, historien des jardins, le parc de Louvois reste une des plus pures et des plus belles compositions du célèbre jardinier. Ce raffinement et cette élégance sont les valeurs cultivées depuis toujours par la Maison Laurent-Perrier, que nous approuvons assurément… un verre de champagne à la main.

Patricia Courcoux Lepic


lundi 23 janvier 2012

Destination Malbourough à la découverte du Cloudy Bay


Relaxez-vous : nous partons à l’autre bout de la planète à la rencontre du meilleur sauvignon blanc du monde, à la découverte de la perle du pacifique : Le Cloudy Bay. Une baie pas si nuageuse…


Internationalement reconnue pour son sauvignon blanc, Marlborough est la plus grande région vinicole de Nouvelle-Zélande. Pour tous ceux qui auraient comme unique connaissance de ce pays le haka des Maoris avant un match de rugby, petite précision : la Nouvelle-Zélande est constituée de deux îles, appelées tout simplement « île du Nord » et « île du Sud ». Ce pays est aussi depuis plusieurs dizaines d’années un pays producteur de très bons vins. L'île du Nord accueille la plus grande partie de l'encépagement néo-zélandais, c'est elle qui fournit les meilleurs rouges du pays. Et l'île du Sud, qui nous intéresse aujourd’hui, se distingue par ses merveilleux sauvignons de Marlborough.
À titre de comparaison, le climat de l’île du Nord, voisin de celui du Piémont, est beaucoup plus frais que celui des régions opposées dans l'hémisphère nord, soit une zone s’étendant du sud de l'Italie à la Tunisie. L’île du Sud, elle, s'étend entre le quarantième et le quarante-sixième parallèle, c'est-à-dire l'équivalent d’un territoire allant de Madrid au Beaujolais, mais avec un climat plus proche de celui qui règne dans la moitié nord de la France et en Allemagne. Donc pas très chaud !

Marlborough, la perle du Pacifique
Les régions viticoles de l’île du Sud sont Nelson, Marlborough, Canterbury et Otago. Celle que nous allons découvrir maintenant se situe au nord-est de l’île, il s’agit de Marlborough. C’est un peu la région de qualité, et référence de l'île du Sud. C’est aussi la plus ensoleillée du pays et l’une des plus sèches. Elle accueille le tiers de l'encépagement néo-zélandais et est reconnue pour son fameux sauvignon. D’ailleurs, aux yeux d'une bonne partie du monde anglo-saxon, le sauvignon aurait trouvé ici son meilleur terroir au monde, détrônant Pouilly-Fumé et même Sancerre. Nous ne sommes pas ici pour créer des polémiques, mais il faut bien reconnaître que ce sauvignon est la perle du pacifique !
Toujours est-il que le sauvignon néo-zélandais se distingue assez facilement, avec ses saveurs évoquant la groseille, l’asperge, voire le haricot vert pour certains. Le sauvignon de Marlborough a un côté argileux, comme le chablis. Il est à consommer avec modération (comme vous le savez !) dans les douze à dix-huit mois. 
Voilà pour les bases. De toute façon, il vous faudra bien le goûter pour vous faire votre propre idée.
Cloudy Bay, une icone stylée
Il était une fois, dans la vallée de Wairau, un domaine qui allait mettre le sauvignon blanc de Nouvelle-Zélande sur la carte des vins du monde : le Cloudy Bay, un vin qui a créé un véritable style international ! Le domaine doit son nom au Capitaine Cook, qui baptisa ainsi la baie où il débarqua en 1770, forcément un jour assez nuageux. Distante seulement de quelques kilomètres, la mer apporte aux vignes du domaine un climat maritime doux et régulier tout au long de l’année. C’est aussi un terroir à l’ensoleillement exceptionnel. Au milieu du vignoble serpente une large rivière, et les montagnes qui enserrent la vallée permettent aux vignes de garder la fraîcheur dont elles ont besoin. Voilà pour le décor. Mais lorsque vous visitez ce somptueux coin de la Terre pour la première fois, ce qui impressionne le plus est la force et la qualité de la lumière.

Cloudy Bay, c’est 250 hectares de vignes. Les principaux cépages en sont le sauvignon blanc, le chardonnay et le pinot noir, ainsi qu’une petite quantité de gewurztraminer, riesling et pinot gris. Créé en 1985 par Kevin Judd et David Hohnen, le vignoble de Cloudy Bay fut l’un des tout-premiers de Marlborough. Le travail et le soin constant apportés par les équipes pendant toutes ces années ont donné les lettres de noblesse et permis la notoriété qu’ont ces vins aujourd’hui. « Nous avons planté de nombreux cépages très différents, mais celui qui sied le mieux au climat est le sauvignon blanc, qui donne des vins vraiment intéressants » confie Kevin Judd, le co-fondateur du domaine. Depuis 1990, c’est Estates & Wines, la division vins de Moët Hennessy, qui en est propriétaire. « Notre travail consiste à préserver les fruits et les arômes du raisin lorsque l’on élabore le vin, car le raisin sur la vigne a déjà un goût très fort de sauvignon blanc » précise l’œnologue du domaine Nick Lane. Les efforts étant concentrés sur la pureté et la fraîcheur du fruit, les vendanges sont effectuées la nuit, et les températures basses préservent ainsi les fruits. Une fraîcheur qui est amenée directement en cave. Les équipes se relayent même vingt-quatre heures sur vingt-quatre, afin de vendanger immédiatement les parcelles qui le nécessitent !

Avec de telles méthodes, Cloudy Bay a ouvert la Nouvelle-Zélande au monde, et transporté le monde jusqu’à Marlborough : ce vin enchante les wine-lovers depuis plus de deux décennies. Les vins du domaine sont exportés dans plus de trente pays ! Les principaux étant le voisin australien, puis l’Angleterre, les Etats-Unis, l’Europe et le Japon. Bonne nouvelle, donc, puisqu’il n’est pas nécessaire d’aller jusqu’à Marlborough pour le goûter…
Largement considéré comme la quintessence des vins de la région, Cloudy Bay Sauvignon Blanc est un vin de référence internationale, reconnu pour ses arômes, ses saveurs de fruits purs et sa structure fine. Vous pourrez bien sûr le déguster avec des fruits de mer ou des plats asiatiques pas trop épicés. Mais, faites-moi confiance, avec un plateau de fromages, quelques olives et un verre de Cloudy Bay, le temps s’arrête. Et une baie nuageuse apparaîtra peut-être devant vos yeux.

Patricia Courcoux-Lepic

mercredi 11 janvier 2012

La Saga LILLET, ou la fabuleuse histoire de l'apéritif doré.


La saga Lillet

Podensac, Gironde, petit village des Graves pas très loin de Sauternes. Nous sommes dans le berceau d’un apéritif doré aux 130 ans d’histoire, grâce à un marketing à rendre humble le plus créatif des publicitaires d’aujourd’hui.

En arrivant à Podensac, ma connaissance du Lillet se résume à un apéritif de couleur or, assez sucré, aux arômes d’oranges, que l’on peut également apprécier en accompagnement du foie gras (ça, c’est parce que j’adore le foie gras). Autant dire que je ne sais pas grand-chose. Il existe bien un Lillet rouge, m’a-t-on dit, mais je ne pense pas l’avoir jamais goûté. Une seule information me revient sur cet apéritif français mystérieux : il s’agit d’une boisson hyperbranchée à New York et, encore aujourd’hui, de la première marque d’apéritif à base de vin français importée aux Etats-Unis !
Commençons par un tout petit verre de Lillet, discrètement posé sur la table, en compagnie de Cécile Bernhard, sa mémoire cachée. Malgré les cent ans qui la séparent de la naissance de la marque, elle en a une connaissance impressionnante. L’histoire de la bouteille dorée à l’étiquette blanche me séduit déjà : Cécile a en face d’elle une oreille très attentive !


De la Liqueur hygiénique à la Crème de cocu
C’est en 1887 que Raymond et Paul de Lillet fondent la maison familiale « Lillet Frères ». Ils sont négociants en vin fins, confiseries et liqueurs. En réalité, précise Cécile, la création de la maison remonte plutôt à 1875,  date vers laquelle des factures mentionnent « Lillet-Frères : confiseurs-liquoristes Podensac-Gironde. Fabriquant de Limonade-gazeuse. Entrepôt de vins fins, eau-de-vie, cognac, armagnac, absinthe, kirsch, vermouth. Fabriquant de sirops, liqueurs, fruits confits au sirop, à l’eau de vie et au jus. » Une sorte de multinationale avant l’heure !
La maison Lillet commercialise à l’époque des produits fabriqués par ses soins, comme les liqueurs de noyaux (mélanges de noyaux d’abricots et d’amandes amères) et des liqueurs à base d’épices et de plantes : crème de vanille, de thé ou de menthe, ainsi que certaines aux noms étranges ou enchanteurs comme La liqueur de scubac (cannelle, girofle, muscade et safran) ou La liqueur hygiénique (angélique, calamus, myrrhe et cannelle).
Cécile me montre aussi de drôles d’étiquettes rangées dans un tiroir : La crème de pucelle, La crème de vierge, ou La crème de cocu… Et d’autres plus classiques comme les liqueurs de la fanfare ou de la Bastille, sans oublier le N’importe quoi, servi dans un café lorsque, à la question « Que prendrez-vous ? », vous répondiez « N’importe quoi ! ». La maison produisait aussi des crèmes d’ananas ou d’orange. La crème du parfait amour est réalisée à base de citron, d’orange et de coriandre, une herbe qui avait été très « hype » sous Louis XIV. Le port de Bordeaux est un lieu idéal pour les liquoristes : là convergent les cargaisons d’épices en tout genre, graines d’anis, oranges vertes, café ou cacao, ainsi que les sucres antillais. Ces importations expliquent la diversité des composants de ces nouveaux breuvages, et le sucre dont ils sont chargés leur permet de supporter les longs voyages à l’export. Les Frères Lillet commercialisaient aussi des marques de rhums, des portos et des xérès, pour n’en citer que quelques-uns. Sans oublier des vins français de la Gironde : graves, sauternes et cérons.
Et nous voilà à nouveau en 1887, date de la création du fameux Kina Lillet, l’utilisation du quinquina comme principe amer du Lillet répondant aux goûts de l’époque. Il sera le premier produit dont ils ont entièrement inventé la formule, et il restera longtemps le produit leader de la maison avant d’en devenir l’unique produit. Ce qui, nous le verrons plus tard, sera déterminant pour la réussite de l’entreprise.


Et le Lillet devient in
Sans entrer trop précisément dans les détails techniques de fabrication, sachez que le Lillet est composé à 85 % de vin. Plusieurs liqueurs y sont ensuite ajoutées, produit du mélange d’infusions, d’alcool, de sirop de sucre et d’eau distillée. À l’époque des créateurs de l’entreprise, un Lillet d’exportation - ou double quinquina - sera fabriqué spécialement pour les colonies. Les vertus combinées du vin et du quinquina font la réputation des vins dits toniques, très en vogue aux Etats-Unis à la fin du XIXe siècle. Leurs indications thérapeutiques sont même très larges : réparateur, fortifiant, digestif, reconstituant, souvent recommandé par les médecins contre la fièvre, l’anémie, ou encore la faiblesse musculaire et nerveuse ! Les frères Lillet ne sont pas les derniers informés des modes en matière de boissons. Aussi, pour séduire les femmes, ils atténuent l’amertume de la recette et commencent à communiquer sur la marque : lettres blanches ombrées de noir sur fond rouge vif. Le véritable Lillet est né ! Les deux frères sont de vrais communicants. Une fois la stabilité du produit définitivement assurée et sa qualité maintenue, nos deux compères vont concentrer tous leurs efforts sur la publicité, stratégie qui demeurera leur ligne de conduite.

Nous sommes début 1900. Lillet devient un apéritif à la mode. On le déguste bien au-delà de Bordeaux : il est présent de Toulouse à Paris, mais aussi en Afrique, en Argentine, au Mexique, en Angleterre et aux Etats-Unis. Les grandes occasions, soirées d’ambassadeurs et réceptions officielles sont réussies grâce au Lillet ! Somptueuses affiches, kiosques de dégustation, plaques émaillées, éventails, toutes sortes de supports sont inventés pour promouvoir la boisson au Kina. Les affiches qui illustrent ces pages témoignent d’une énergie et d’une inventivité bien en avance sur son temps. La médaille d’or remportée en 1900 lors de l’exposition universelle de Paris renforce plus encore la marque. En 1938, l’entreprise connaît un véritable succès commercial, le marché anglo-saxon étant le plus porteur grâce au lancement du Lillet dry : un peu de Lillet avec du gin ou en cocktail.


Un succès très jet set
Les années passent. André et Marcel ont succédé à Paul et à Raymond, puis cèdent la tête de l’entreprise aux quatre fils d’André. Chaque génération s’applique soigneusement à respecter la consigne des débuts : la qualité sera toujours payante. En 1946, Lillet s'introduit complètement aux États-Unis grâce au négociant new-yorkais Michel Dreyfus qui en fait la boisson la plus branchée de New York. C’est encore lui qui inspirera la naissance du Lillet rouge en 1962. La marque remporte un grand succès dans les années 60 grâce aux campagnes de publicité dans la presse et à la radio, développées par Pierre Lillet spécialement pour les États-Unis.
En 1950, la duchesse de Windsor, grand amateur de Lillet, l'introduit dans la haute société, notamment chez Fauchon puis dans certains grands hôtels parisiens comme le George V ou le Ritz. Par la suite, Lillet s'implante sur la Côte d'Azur afin de répondre à la demande américaine. Les présidents Jimmy Carter, Valéry Giscard d’Estaing ou encore François Mitterrand font partis des fans de Lillet.

Mais le marché des apéritifs devient de plus en plus compétitif. La société Lillet n’échappe ni à cette concurrence ni aux modes qui passent de plus en plus rapidement. En 1985, il s’en fallut de peu que Lillet passe aux mains des américains pour devenir Lillet. Inc. Eh bien non : un Bordelais en tombe amoureux, un soir dans un bar de Manhattan, et rachète l’apéritif préféré des New-yorkais. Bruno Borie, propriétaire d’un grand cru bordelais, entreprend de moderniser le matériel, restaure les chais et fait même revoir la recette, tout en respectant les caractéristiques originelles du breuvage. Il collabore avec l’Institut d’Œnologie de Bordeaux pour améliorer la composition du Lillet et lui donner une seconde vie. Tout est dépoussiéré : la charte graphique est modernisée, une nouvelle campagne de publicité voit le jour, et la nouvelle bouteille de 75 centilitres remplace celle d’un litre. Résultat : en 1999, Lillet devient l’une des cent premières marques vendues en France ! Et l’histoire ne s’arrête pas là, quand en 2008 la société Ricard en devient propriétaire : avec un savoir-faire de « pro », les fondateurs peuvent être rassurés, la petite bouteille a l’éternité devant elle.


Lillet est l’exemple parfait d’une marque attachée à l’histoire de la région de Bordeaux, une marque aux gènes familiaux, une marque, enfin, qui symbolise à la fois la qualité et la différence.
Je terminerai cette visite par un verre de la Réserve Jean de Lillet Blanc, imaginant les Frères Lillet faisant de même après une folle journée de travail. Le temps ne semble pas avoir de prise sur ces bâtiments 1930, témoins de toutes ces inventions liquoreuses. Si vous passez par la Gironde, arrêtez-vous à Podensac, vous respirerez 130 ans d’une attachante saga familiale. Même sans Cécile à vos côtés, le petit musée vous fera revivre l’histoire de la famille Lillet.

Patricia Courcoux-Lepic

Préparation des vins et élaboration des liqueurs
Au cas où vous souhaiteriez faire vous-même votre Lillet, voici quelques astuces…

Les vins sont assemblés jusqu’à l’obtention des liqueurs, résultat de la macération à froid de chaque fruit dans l’alcool. Les principes sont ensuite extraits après quatre à six mois, pour procéder à l’écoulage et au pressurage des fruits et des écorces. Ne soyez pas impatient.

Pour le Lillet Blanc, il vous faut des cépages de sémillon pour une structure grasse et ample, et pour le Lillet Rouge des cépages typiques du Bordelais, cabernet-sauvignon et merlot plus tannique.
Les fruits et écorces utilisés pour la fabrication des liqueurs proviennent du monde entier (bon voyage !) : les oranges douces du sud de l’Espagne, les oranges amères d’Haïti, les oranges vertes du Maroc ou de Tunisie, puis enfin le quinquina (écorce d’un petit arbre d’Amérique du Sud) pour la petite note d’amertume… Les autres fruits relevant du secret Lillet, laissez libre cours à votre imagination. Vous en savez assez de toute façon.

1.    Le vinage : Il s’agit de l’assemblage des vins (85 %) et des liqueurs (15 %), réalisé dans des cuves où le brassage se fait lentement, jusqu’à un assemblage parfaitement homogène.
2.    L’élevage : À prévoir en cuves de chêne pendant 6 à 12 mois, pour obtenir les arômes et la maturité qui caractérisent votre nouvel apéritif préféré. Sachez que Lillet est soigné comme un grand cru bordelais.
3.    L’assemblage des cuvées : Il se fait en fonction des notes aromatiques et du vieillissement, afin de donner à Lillet l’élégance qui le caractérise.
Voilà, vous savez tout !

P. C-L.

mercredi 4 janvier 2012

Soneva Gili by Six Senses, ou le luxe intelligent


Soneva Gili by Six Senses, ou le luxe intelligent

Le Mahatma Gandhi serait sans doute très heureux de savoir que l’une de ses pensées sert aujourd’hui de mantra à un groupe hôtelier aux valeurs écologiques, unique au monde :

« There is more to life than increasing its speed »
(Il y a plus important dans la vie que d’aller toujours plus vite)


Nous sommes sur un petit bout de terre posé au milieu de l’océan Indien. Un de ces endroits du monde auxquels on pense forcément de temps en temps, en rêvant de s’y arrêter un jour, peut-être, pour précisément se « retirer du speed de la vie ». Un petit atoll qui peut paraître bien vulnérable vu du ciel. Et pourtant. Sur la petite île privée de Lankanfushi au Nord de Malé, la capitale Les Maldives, le Soneva Gili ressemble à une cité lacustre avec ses quarante-cinq maisons délicatement posées sur pilotis. Voilà pour le décor en mode aérien.

Rapprochons-nous. Justement au plus près de la nature. C’est exactement ce que Sonu et Eva Shivdasani ont souhaité mettre en premier plan. L’idée des deux fondateurs des hôtels Six Senses Resorts & Spas était d’imaginer un concept hôtelier luxueux, mais décalé des standards classiques des hôtels de luxe. Ici, l’authenticité prime. Vous penserez sans doute à ce stade de lecture qu’il s’agit d’un Resort de luxe posé sur un mouchoir de sable blanc au milieu de l’océan Indien, comme tant d’autres alentour. Oui, c’est vrai, il y en d’autres. Aucun n’a cependant, à mon sens, une approche économique écologique si fortement impliquée dans les ressources locales. C’est aussi une histoire d’amour qui a fait naître aux Maldives le premier hôtel de ce groupe hôtelier : Eva tombe amoureuse des Maldives lors de son premier voyage, puis elle tombe amoureuse de Sonu… Ils décident de mettre en pratique une philosophie du luxe intelligente, et le concept voit le jour en 1995 avec la création du premier hôtel de l’archipel doté d’un spa. Un conte de fées transformé en succès immédiat, qui donnera très vite naissance à d’autres hôtels.

Ici, chaque détail respect l’environnement. Avant de vous parler des potagers, amoureusement cultivés par chacun des hôtels, nous voici maintenant les pieds dans le sable. Et cela tombe bien car l’une des philosophies de l’hôtel est « no news, no shoes » : un petit sac portant cette inscription vous invite à ne pas utiliser vos chaussures, et à vous promener pieds nus le temps de votre séjour. Et laissez-moi vous faire découvrir ces maisons sur pilotis décorées de bois maldivien, construites en matériaux naturels : les meubles sont en bambou, en teck ou en bois recyclés, tout a été réalisé par des artisans locaux. Le luxe est tout de même là : chacun a sa terrasse privée sur l’eau, une salle de bains intérieure et également extérieure. Mais rassurez-vous, l’intimité est bien préservée, sans voisin juste à côté.

Comme les photos vous le prouvent, la mer est bien cristalline et chaude (ça, c’est votre dévouée cobaye qui vous le dit). Voilà pour les bases. Et hop, c’est l’heure d’un verre au bar sur pilotis, pour terminer de vous convaincre que vous ne rêvez pas et que tout ce qui vous entoure n’est pas irréel. Cela le redevient néanmoins quelques instants lorsque vous découvrez la cave à vins, où sont entreposés sous la mer plus de trois cents crus du monde entier ! Si le cœur vous en dit, un dîner ou une dégustation peut être assez facilement organisé rien que pour vous… Un peu plus loin, le restaurant Sense by the Sea vous propose une cuisine fusion péruvienne et japonaise. Et comme il est situé en hauteur, vous aurez une vue infinie sur l’océan. La plupart des ingrédients utilisés proviennent, comme je vous le mentionnais plus haut, du jardin potager bio. Ainsi, les chefs viennent y cueillir des salades, des fruits et des légumes qui seront préparés devant vous ! Les thérapeutes des spas, eux, s’y servent en herbes aromatiques.
Rassasié, il est temps de vous ressourcer. Réveiller votre sixième sens est une véritable philosophie ici. La démarche holistique des thérapies proposées au spa est l’une des spécificités des Six Senses Spas voulues par Sonu et Eva Shivdasani : restaurer l’harmonie entre le corps et l’esprit. Une expérience que je vous souhaite de pouvoir faire, car je suis convaincue… et je ne vais peut-être pas rentrer !

Le respect de l’environnement, vous le savez maintenant, est un véritable leitmotiv de Six Senses & Spas. Vous ne quitterez pas cet éden sans avoir pris conscience des efforts intenses mis en place autour de vous par ce groupe hôtelier. Si vous souhaitez par exemple garder vos draps et ou votre linge de toilette un jour de plus, vous déposez simplement une petite étoile de mer sur votre lit, le personnel comprendra. Ici, pas de voiture, c’est à pied ou à vélo que vous vous déplacez. Un programme pour compenser les émissions de gaz à effet de serre a été mis en place, et des sources d’énergies renouvelables comme le solaire et l’éolien remplacent progressivement les énergies classiques. Et ce n’est que le commencement d’un énorme chantier.
Vous garderez bien sûr le souvenir des fonds marins translucides et des poissons sublimes qui y vivent. Partez sans crainte, ils se savent protégés. Ici, on veille avec respect à leur environnement.

Patricia Courcoux Lepic